Bonjour,
Nous voilà reconfinés pour plusieurs semaines. Reconfinement sans doute nécessaire pour contrôler l'épidémie.
Pour beaucoup de Français, le reconfinement est une forme brutale de l'hiver. Hiver familial, hiver social, hiver culturel, hiver associatif.
Je pense aux personnes seules, âgées, handicapées, je pense aux familles dans de petits appartements..
Le reconfinement est une lourde épreuve pour toutes ces personnes, alors que toute vie sociale, culturelle, associative est étouffée et que la vie familiale est règlementée.
Que reste-t-il à ces personnes ?
À quoi se raccrocher ?
À la TV ? Les mauvaises nouvelles déversées en boucle ne font que nourrir la peur.
Aux rêves ? Peut-on encore rêver sous un ciel aussi sombre ?
Il ne reste que la solidarité de la vie quotidienne. Celle des plus modestes pour les plus modestes.
Car la peur peut tout transformer à l'exception du cœur ;
Le cœur de l'Homme est comme la terre, on peut semer, planter, bâtir et même détruire, le cœur n'en continue pas moins à produire de l'amitié et de l'amour.
Le 16 Octobre, la barbarie a ajouté l'horreur à la rudesse de l'hiver du confinement, avec l'assassinat d'un professeur qui enseignait la liberté d'expression.
C'est peu dire que nous vivons des temps horribles.
Alors, la tentation de céder à la peur, à l'angoisse est forte, et légitime.
Céder à la peur, serait leur victoire, la victoire de la barbarie sur nos valeurs.
Reconfinement :
Ce mot a envahi brutalement notre vie quotidienne.
Il est partout. Dans les rues, sur les portes de nos boutiques, de nos restos, de nos bistrots, sur la vie associative et même sur la vie familiale.
Il a jeté sur les livres, sur la culture un voile d'interdits.
Et pourtant, en ces heures difficiles nous aurions bien besoin de la culture qui s'adresse à l'Homme, à l'Homme tout entier.
Il est sur nos libertés, d'aller et de venir, de manifester, d'informer.
Tout est confiné, même la démocratie.
Et le pays éclairé par Voltaire, où a grondé Danton, où a tonné Hugo, où a accusé Zola, où a crié Jaurès, se tait et baisse la tête.
Sans doute en un pareil moment serait-il folie de vouloir protester, critiquer, crier.
Et pourtant il le faut même si les vents sont contraires.
Les oiseaux ne volent bien que contre le vent.
On nous invite régulièrement à être responsable.
Mais être responsable, c'est refuser de baisser la tête.
C'est refuser de capituler devant la peur, devant la fatalité.
C'est donc d'une certaine façon refuser la soumission à la peur qu'elle qu'en soit la cause.
Être responsable c'est donc résister.
Pour résister Eluard écrivait le mot liberté partout.
Pas évident d'écrire liberté en ce moment, alors écrivons : Résistance.
Pour conclure cette lettre, amis déconfinés et reconfinés, une question me paraît s'imposer :
Confinement, déconfinement, reconfinement, couvre feu :
Quel sera l'état de notre société après toutes ces semaines d'interdits ?
Interdits familiaux, sociaux, culturels, associatifs,
Sera-t-il possible de recoudre tous les liens brisés pendant des semaines ?
Certes, l'annonce d'un vaccin est une lueur d'espoir.
Pour autant, nous savons bien que le jour d'après ne se réduira pas à la mise à disposition d'un vaccin.
Les blessures sociales, avec l'explosion de la pauvreté, l'aggravation du chômage, des fractures sociales sont trop vives pour être ignorées.
Leur guérison complète prendra du temps, exigera des efforts de solidarité.
Au fond, au delà du traitement nécessaire et prioritaire de l'épidémie, c'est un vrai choix de société qu'il importera de faire.
Allons nous poursuivre sur la voie d'une société de plus en plus déshumanisée qui réduit les relations humaines, éloigne les citoyens des décisions, ou bien faire le choix d'une société plus humaine, celle de la proximité, des partages, de la solidarité.
Alors que trop de centres de décision s'éloignent de plus en plus des citoyens, nous avons besoin de proximité, de repères proches de nous.
Il ne s'agit pas de rêver, ni d'être naïfs, mais de bien prendre en compte tous les enjeux du moment pour bien éclairer les choix de l'avenir.
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