Nous, habitant·es de Saint-Étienne, demandons à la mairie de s’engager à ne jamais installer de vidéosurveillance algorithmique dans la ville car nous refusons que nos rues servent à l'expansion de cette forme de surveillance.
La loi relative aux Jeux Olympiques et Paralympiques du 19 mai 2023 a introduit dans le droit français la possibilité pour les préfectures d'avoir recours à la vidéosurveillance algorithmique (VSA) : une première en Europe.
Profitant de cette expérimentation liée aux JO, Laurent Wauquiez, alors président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, a fait voter le jeudi 21 mars 2024 en Conseil régional, le déploiement de la vidéosurveillance algorithmique dans tous les lycées et trains d’Auvergne-Rhône-Alpes (1).
La vidéosurveillance algorithmique (VSA) est un système qui vise à automatiser le traitement d’images de caméras de surveillance : « une couche algorithmique » est ajoutée aux caméras « classiques » de vidéosurveillance. Les images captées par les caméras sont analysées par des algorithmes.
Nous nous opposons au déploiement de cette technologie qui représente une menace pour nos droits fondamentaux, tels que le droit à la vie privée, la liberté de réunion et d'association, la liberté de circulation dans l’espace public et le droit à la non-discrimination.
LA VSA représente une véritable porte d’entrée pour la reconnaissance faciale, dont les expérimentations se sont également multipliées ces dernières années (2). La VSA rend déjà possible l’identification biométrique par la reconnaissance de traits distinctifs (une silhouette, un habillement, une démarche) et repose sur les mêmes algorithmes d’analyse d’images.
Ces technologies sont incompatibles avec la préservation des droits humains. Nous ne voulons pas que notre ville prenne part à la surveillance généralisée et permanente des populations.
Nous sommes convaincu·es que la rue est un espace de rencontres, une expérience d’altérité, d’exercice de nos droits politiques, un lieu de création au sein duquel une surveillance aussi massive qu'intrusive n'a pas sa place. Installer de tels logiciels de VSA dans notre ville impliquerait de considérer l'ensemble de ses habitant·es comme d'éternel·les suspect·es. Nous refusons de voir nos comportements et nos allées et venues analysées en permanence dans notre lieu de vie. Nous refusons d’être des pourvoyeur·euses de données scruté·es par des algorithmes afin d'améliorer des logiciels dangereux développés par des entreprises privées.
Cette « expérimentation » de VSA devait être soumise à une évaluation par un comité indépendant. Chargé d’analyser l’efficacité et l’impact de cette technologie, il est censé rendre un rapport au Parlement le 31 décembre 2024 au plus tard.
Or, sans attendre les conclusions du rapport (et sans le début d’un débat démocratique), le Premier ministre Michel Barnier a dit souhaiter une « généralisation de la méthode expérimentée pendant les Jeux olympiques », à savoir autoriser de façon permanente l'usage de la VSA (3).
Alors que l’extrême droite occupe une place prégnante dans le paysage politique, nous redoutons que ces outils ne tombent dans les mains d’un pouvoir encore plus enclin à démultiplier les logiques autoritaires.
Nous demandons donc résolument à la mairie de Saint-Étienne de refuser d'installer la VSA dans notre ville. Nous pensons que la sécurité doit se construire collectivement ensemble, par des politiques sociales, par de la prévention spécialisée plutôt que par une vidéosurveillance algorithmique attentatoires à nos libertés.
Sources :
1. Voir article : « La région AURA vote le déploiement de la VSA dans les gares et les lycées »
2.https://www.amnesty.fr/actualites/france-technologies-de-surveillance-reconnaissance-faciale
3. https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/police/info-franceinfo-la-videosurveillance-algorithmique-experimentee-pendant-les-jo-va-etre-generalisee-par-le-gouvernement-barnier_6812678.html ; Voir aussi la déclaration de Laurent Nuñez le préfet de police de paris : https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/09/25/le-prefet-de-police-de-paris-se-dit-favorable-a-une-prolongation-du-recours-a-la-videosurveillance-algorithmique_6333125_3224.html
Organisations et collectifs signataires : Halte au contrôle numérique, XR Saint-Étienne
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